55
Jafar Tabrizi (1395-1480) fut l’un des calligraphes azerbaïdjanais les plus reconnus, spé-
cialisé dans les styles d'écriture
nastaliq, taliq
et
thulth,
ainsi que le mentor d'un
certain nombre d'artisans locaux notables. Étant un des calligraphes les plus renommés
de l'Horasan et du Turkestan au XVe siècle, Jafar Tabrizi fut, à son tour, formé au
nastaliq
par un autre expert azerbaïdjanais célèbre, Mir-Abdulla Tabrizi, également
connu parmi ses pairs sous le nom de Shekeri Gelem (Doux stylo). La vie de Jafar
Tabrizi a coïncidé avec la période de la conquête de l'Asie centrale par Amir Timur.
Après avoir travaillé pendant un certain temps à la Cour de Miranshah, le fils de
Timur, à Tabriz, Jafar Tabrizi, accompagné d’un groupe d'autres artisans, alla rejoin-
dre, à Hérat, la Cour de l'autre fils de Timur, Shahruh. Là il jouit d'un appui consid-
érable du fils de Shahruh, le Prince Baysungur. C'est grâce à cette attention et ce
soutien que Jafar Tabrizi acquis son nom de plume, Baysunguri. Selon une étude de
Parviz Kazemi, alors qu'il séjournait à la Cour royale du Prince Baysungur (Baysungur
Mirza), Jafar Tabrizi réussit à écrire le Shâh Nâmeh de Ferdowsi (1430), le Gôlestan
de Saadi (1427), Khamsa de Nizami Ganjavi (1431). Ces manuscrits sont actuellement
préservés dans les plus grands musées et bibliothèques de Paris, Dublin, Téhéran, Is-
tanbul et Saint-Pétersbourg.
Selon les sources médiévales, à la même période, Jafar Tabrizi dirigeait aussi une petite
bibliothèque et un atelier qui faisait de la production de manuscrits. Outre les cal-
ligraphes, l'atelier employait des artistes de la miniature, doreurs, tanneurs, restaura-
teurs et relieurs. Excellent mentor et manager, Jafar Tabrizi a joué un rôle majeur dans
le développement de la bibliothèque, en présentant des rapports réguliers sur le ren-
dement à Baysungur Mirza. Un de ces rapports, en date de juin 1427, est actuellement
conservé au Musée du palais de Topkapi à Istanbul. Dans la description des activités
entreprises, le rapport mentionne le nom de 18 miniaturistes, calligraphes, relieurs et
doreurs qui travaillaient à la bibliothèque. Outre le style d'écriture
nastaliq
,
Jafar
Tabrizi a réussi à maîtriser les six styles d'écriture classiques et la calligraphie
taliq
.
Même s'il est célèbre en tant qu’expert du
nastaliq
,
il était encore plus compétent
dans les styles d'écriture classiques anciens. À cette époque, deux types de style
nastaliq
étaient dominants, le grand et le petit. Le grand
nastaliq
était normalement utilisé sur
le
qita
,
un morceau de papier accroché au tableau décoré de poèmes laïques et
d'esquisses. Petits et moyens
nastaliqs
étaient généralement utilisés pour écrire des
vers poétiques. Les petits
nastaliqs
ont été davantage développés à Hérat dans la sec-
onde moitié du XVe siècle. Depuis la fin de cette période, ce style d'écriture est connu
par les artisans locaux comme le style hérati, avec Jafar Tabrizi reconnu comme son
fondateur. La poésie est une autre passion de Jafar Tabrizi qui lui a valu une grande
renommée. Il est l'auteur de l'épitaphe de Baysungur Mirza et d'œuvres poétiques
dédiés à Shahruh et ses fils les princes Baysungur et Ala ad-Dovle. Jafar Tabrizi est
décédé à Hérat à l'âge de 65 ans.
,
,#4#
Manuscrits de l'Azerbaïdjan