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En mer, la tempête commençait. À chaque instant le vent
augmentait de violence. Le jour s'était levé depuis longtemps,
mais le ciel, maussade, ne s'éclaircissait pas. L'eau trouble était
couleur de plomb. Sans la crinière écumeuse des vagues, on
aurait pu la croire mélangée de mazout. Des nuages bas
couraient vers le sud, pourchassés par le vent.
Cette fois, Taïr était de l’équipe du matin. Il avait oublié ce
que Djamil lui avait raconté, les premiers jours de son arrivée,
au sujet des tempêtes en mer, et il n'aurait jamais cru que le
vent pût être si fort. Il lui semblait que par un temps pareil les
travaux devaient s'arrêter. Le
Tchapaev
viendrait alors les
prendre pour les reconduire sur le rivage. Mais le travail
continuait, la table de rotation tournait toujours, et les vieux
ouvriers ne manifestaient aucune inquiétude. Taïr aurait voulu
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CHAPITRE IX