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Quand Djamil et Taïr arrivèrent au quai pour se rendre au
forage, les vagues moutonnantes de la Caspienne venaient avec
un bruit sourd battre furieusement les rochers de la rive. L'or du
couchant s'était répandu sur la mer écumeuse. Les vagues qui
s'entrechoquaient et se cabraient étaient comme enflammées
par les rayons obliques du soleil ; on eût dit un immense
incendie sur la mer. Taïr, qui l'avant-veille avait admiré les
étoiles de la ville nocturne, ne pouvait détacher ses yeux de la
flamme chatoyante des vagues. Son regard avide suivait tous
les jeux des couleurs ; elles s'allumaient sur les eaux, se
fondaient en une pourpre violente ou rosissaient, tel un nuage
au couchant. Il était saisi par ce spectacle au point d'oublier où
il était et pourquoi il était venu.
Tout à coup, ils aperçurent à gauche une petite chaloupe, le
Tchapaev
,
qui approchait en fendant les vagues. Quand elle eut
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CHAPITRE II