fort, et la colonne de boue monta plus haut en lançant des
pierres comme une gigantesque fronde. Les ouvriers reculèrent
à nouveau. Koudrat, lui, se penchait vers la vanne. Alors, ils le
suivirent, courbés en deux, cachant leur visage dans leurs
mains, et unissant leurs efforts, ils la mirent en place et la
fixèrent.
La fontaine était matée.
«
Comment cela s'est-il produit, Timoféi Sidorovitch ? »
demandasévèrementIsmaïlzadé au vieux maître foreur qui se
tenaitdevant lui, tête basse.
Ce grand type au long visage émacié et aux yeux clairs était
nettement désolé que cet incident inadmissible se fût produit
dans son secteur.
«
C'est de ma faute, j’aurais dû être plus attentif, dit-il sans
relever le front.
J'en doute » répondit Ismaïlzadé.
Et s'adressant aux ouvriers qui l'entouraient, épuisés par
l'effort fourni :
«
TimoféiSidorovitch dit que c'est de sa faute. Mais je ne le
crois pas. Il y a longtemps que je le connais ; jamais encore on
n'a pu l’accuser de négligence.
Vous avez raison, dit un jeune gars en se détachant du
groupe des ouvriers. C'est moi qui n'ai pas vu… j'étais distrait,
je n'ai pas prévenu à temps.
On ne te demande rien ! »marmonna le maître. Et il
s'éloigna.
Ismaïlzadé, sans ajouter un mot, regagna la chaloupe et se fit
conduire au derrick d'
ousta
Ramazan.
Ce fut le vieux maître qui l'accueillit :
«
Encore debout ? fit-il. Tu n'es donc pas allé te reposer ? »
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CHAPITRE II