tu me persuadais de venir ici, je te considérais comme un ami
véritable, qui me voulait du bien. Mais je vois maintenant que
tu es le premier à me faire du mal.
Moi ?
Djamil avait dit cela avec un étonnement si sincère que Taïr
douta du bien-fondé de ses soupçons.Mais ils le torturaient
depuis si longtemps qu'il résolut d'en avoir le cœur net.
«
Oui, toi ! Qu'est-ce que je t'ai fait pour que tu agisses si mal
envers moi ?
Tu n'es pas malade ? Tu n'as pas de fièvre, par hasard ?
Quand est-ce que j 'ai mal agi envers toi ?
Hé, Djamil, ne t'imagine pas que je ne vois rien. Un
aveugle lui-même comprendrait. En face tu me fais des
sourires, et derrière mon dos tu ricanes !
Djamil avait relevé la tête d'un mouvement brusque :
«
Je ricane ? Quand ça ? Et où ? »
Taïr ne put dissimuler plus longtemps ce qu'il avait sur le
cœur :
«
Dis-moi pourquoi tu te mets tout le temps entre Latifa et
moi ? »
Taïr dévoilait son principal atout.
«
Tu m'as dit qu'elle avait un fiancé. Pourquoi m'as-tu menti?»
Djamil se troubla ; il craignait que Taïr ne devinât le senti-
ment qu'il portait à la jeune fille ; mais il se dit qu'elle était
mieux disposée envers lui qu'envers Taïr et cette pensée le tran-
quillisa. Volontiers il aurait recherché la réconciliation.
«
Ecoute, Taïr, ce n'est plus comme autrefois ; à présent tout
dépend de la jeune fille. »
Mais Taïr étaitencore très excité.
«
Bien sûr, tout dépend d'elle. Mais si tu es toujours en train
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MEKHTI HOUSSEIN
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Apchéron