«
Camarade Ismaïlzadé, dit-il, vous m'accusez toujours,
mais je vous jure que cette fois le coupable c'est
ousta
Ramazan. Il est si sûr de lui qu'il n'a pas demandé les matéri-
aux à temps. »
Ismaïlzadé comprit que cette fois Badirli disait vrai. Néan-
moins, il déclara :
«
Ousta
Ramazan se fait vieux, il a peut-être tout
simplement oublié ; mais vous, vous deviez le lui rappeler.
Croyez-vous que j'aie du plaisir à vous faire chaque fois des
observations ? Pas du tout ! Vous êtes mon aide… »
Sa voix se fit plus douce :
«
Cher camarade, j'ai une demande à vous adresser : ne faites
pas le larbin, regardez les gens bien en face. Je ne suis pas un
patron, je suis un homme soviétique comme tout le monde.
Nous poursuivons un même but. Bref, je veux dire que
dorénavant vous aurez à me montrer par des actes que vous
savez travailler autrement.
Très bien, répondit Badirli qui sembla comprendre ce que
le nouveau directeur voulait de lui. Mais moi aussi j'ai une
prière à vous adresser, camarade Ismaïlzadé…Convoquez-moi
dans votre cabinet, attrapez-moi, punissez-moi tant que vous
voudrez, mais pas en public. Ou bien alors, on cessera de
m'obéir.
Je vois que vous avez bien mauvaise opinion de nos
ouvriers ! Pourquoi les juger plus sévèrement que vous-même
?
Ne pas voir vos propres défauts avant de parler des leurs? Si
je ne savais trouver dans chacun de mes collaborateurs au
moins quelque chose de bon, il me serait impossible de
travailler un seul jour. Les hommes ne naissent pas mauvais, et
s'ils ont des défauts, c'est qu'ils les ont acquis plus tard, Cela est
vrai aussi pour vous. »
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CHAPITRE V