Quand Minaev eut terminé, des débats animés s'engagèrent.
Les avis étaient partagés. Les uns affirmaient que cela ne
donnerait rien : on avait déjà tenté de construire des appareils
de ce genre, mais ils s'étaient avérés inutilisables. D'autres
appuyaient chaudement l'inventeur, prétendaient que son
appareil pourrait être employé, qu'il réduirait de beaucoup la
durée du forage et hâterait l’exploitation des puits ; c'était
disaient-ils, une innovation capitale dans la technique de
l’extraction du pétrole. D'autres encore hésitaient à se
prononcer. À leur avis, l'essai d'une invention devait se faire
dans les établissements de recherches scientifiques et non aux
chantiers où le travail s'en trouverait nécessairement retardé.
À son tour, Koudrat prit la parole :
«
Une des plus grandes qualités propres à la plupart des
ingénieurs de Bakou, c'est qu'ils ne peuvent rester indifférents
au sort de la production. Beaucoup d'entre eux consacrent leurs
heures de loisir à toutes sortes de recherches, et on peut affirmer
que ces recherches sont organiquement rattachées à leur travail
de tous les jours. Mais parfois des inventions précieuses restent
pendant des années sous le boisseau, par la faute de
fonctionnaires bureaucrates…On s'imagine aisément l'effet que
produit sur l'inventeur l'indifférence obtuse avec laquelle on
accueille le fruit de ses efforts. Elle peut tuer en lui toute envie
de poursuivre ses recherches. Notre devoir sacré est d'empêcher
cela, de tendre la main à nos novateurs, de leur donner la
possibilité d'essayer leurs inventions.
Koudrat avait à peine commencé à parler quand le petit
homme rondelet que tous connaissaient bien, entra dans la
pièce. Il écouta un moment, jeta des regards désapprobateurs à
Koudrat, et l’interrompit enfin :
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MEKHTI HOUSSEIN
.
Apchéron