serrant Pacha contre elle, elle venait de comprendre qu'il lui
manquait un bras.
Quand après s'être doucement dégagé, il s'approcha de son
père, Nissa vit qu'elle ne s'était pas trompée. Ce n'était hélas
que trop vrai ! Elle avait pleuré de joie, mais elle eut la force de
cacher sa douleur. Elle soupira en maudissant Hitler.
Le vieux maître foreur étreignit son fils, mais ne pleura pas
;
ses yeux brûlaient.
«
Je savais que tu reviendrais ! Il remarqua aussitôt qu'il lui
manquait un bras et pour consoler sa femme et se consoler
lui-même, il ajouta : Il n'y a pas de victoire sans sacrifices ! »
Ramazan s'habilla bien vite. Il disait :
«
Alors, il paraît que tu t'es bien battu, mon fils ! Quatre ans
de batailles comme celles-là, ça compte ! Tu fais honneur à ton
vieux père... Tu en as des décorations sur la poitrine ! On voit
bien que même avec un seul bras tu n'es pas resté inactif…
Oh non, père, répondit Pacha de sa belle voix sonore.
Assieds-toi, dit le vieillard. As-tu vu Naïlia ou bien es-tu
venu ici directement ?
Non, je ne l’ai pas encore vue, père. C'est d'ici que je suis
parti au front, et c'est ici que j'ai décidé de revenir tout
d'abord… En voyant que je n'ai plus qu'un bras, qui sait si elle
voudra encore de moi ? dit Pacha mi sérieux, mi plaisant.
Ne parle pas ainsi, mon chéri, c'est un lait pur qui l'a
nourrie répliqua Nissa, et elle se mit à vanter sa belle-fille. Elle
était encore ici hier soir… elle ne fait que regarder la route.
Pacha avait peine à dissimuler sa joie. Son cœur battait très
fort ; il suivit son père dans la salle à manger.
Eh bien, femme, le petit revient de loin, donne-nous
quelque chose à manger. »
La vieille maman s'affaira dans sa cuisine. Par la fenêtre qui
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CHAPITRE VII