présent, se disait-il, Koudrat est mon chef. Pour se venger, il
m'en fera voir de toutes les couleurs.
Mais Koudrat, avec un sourire débonnaire, lui demanda
encore :
«
Qu'en dites-vous, camarade Mirzoev ? Comment
expliquez-vous cela ?
De quoi parlez-vous ?
Du moral de nos ouvriers…Il m'étonne, je l'avoue…
D'habitude, en des jours comme ceux-ci, les nouvelles
désagréables arrivent de partout ; mais aujourd'hui... »
La sonnerie du téléphone l'interrompit. Koudrat prit le
récepteur.
«
Oui, oui, c'est moi, ma fille. . .Dis à
ousta
Ramazan que je
le félicite. Et que, bien entendu, toute l'équipe aura une prime
!
Et les vivres ? Pour le moment ça va ? Bon, je vous en
enverrai. En avion s'il le faut, mais je vous en enverrai.
Dis-le-lui. »
Koudrat ne tenait pas en place. Il fit quelques pas et reprit,
s'adressant à Mirzoev :
«
Voilà ce que j'appelle des hommes ! Ils disent : Nous
n'avons besoin de rien. Mais je soupçonne que pour la nourrit-
ure cela va assez mal. Et le vieux Ramazan qui me répétait :
Non, non, pas la peine, n'envoyez personne, c'est trop dan-
gereux…
Et à présent, ils demandent à manger ?
Vous voyez bien que non. C'est le troisième jour que toute
navigation est interrompue. Les gens n'ont pas eu une heure de
repos… Si à la fatigue vient encore s'ajouter la faim… Eh bien,
malgré tout, ils ne se plaignent pas. Ça ne fait rien, coûte que
coûte je leur ferai parvenir des vivres.
221
CHAPITRE IX