courtaud, debout près de la fenêtre, s'aperçut tout à coup de
l'arrivée de Koudrat, et ils se turent. Un autre se leva et lui of-
frit sa place.
«
Restez, restez » dit Ismaïlzadé.
Il prit une cigarette, l’alluma, et promena sur les capitaines
son regard pénétrant. La plupart étaient tout jeunes.
«
Je ne veux obliger personne à prendre la mer, commença
Koudrat. Ne partiront que ceux qui voudront eux-mêmes
partir… il faut pour cela de la volonté, du cran, de la
prudence… La voix du capitaine du
Tchapaev
monta d'un coin,
dans la pénombre :
Comme c'est moi qui ai le plus d'expérience, permettez
que j'y aille.
— “
Permettez” ? répéta Koudrat. Pourquoi me demander la
permission ? Il avait posé un doigt sur son cœur.
«
C'est lui et lui seul que vous devez écouter.
Il faut bien avouer, camarade Ismaïlzadé, que ce n'est pas
facile. Quand j'ai transporté
ousta
Ramazan, la chaloupe sautait
si fort que nos têtes heurtaient les nuages. Et la tempête a
encore augmenté depuis.
Je sais, répondit Koudrat. Mais la tempête dure depuis
quatre jours. Et il se peut que nos camarades travaillent sans
eau et sans pain. Ils ne veulent pas l’avouer, c'est vrai, mais la
situation est peut-être intenable. Mettez-vous un instant à leur
place. Malgré tout, ils n'abandonnent pas le travail…Alors, qui
veut y aller ?
Tout le monde ! répondit le petit capitaine debout près de
la fenêtre.
Tout le monde ! répétèrent les autres.
Moi ! dit le capitaine du
Tchapaev
.
Je suis prêt.
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CHAPITRE IX