Personne n'est venu téléphoner ?
Je ne crois pas,
ousta
je n'ai rien vu… Ramazan voulut
en avoir le cœur net. Il fit arrêter les machines. Quand leur bruit
eut cessé et que les ouvriers furent rassemblés autour de lui, il
les fit asseoir.
Tiens !
ousta
Ramazan convoque une réunion, dit Taïr. Et
il alla se placer à la droite du maître foreur. »
Depuis le début de la tempête, personne n'avait vu le
vieillard renfrogné. D'où venait le changement qu'ils obser-
vaient tout à coup sur son visage ? Leurs yeux l’interrogeaient
en vain. Qu'est-ce qui le chagrinait ainsi ? Il les regardait en
silence, comme s'il ne savait par où commencer. Ils ont faim,
songeait-il, faim et soif, mais s'aventurer en mer par un temps
pareil, c'est risquer de mourir… Ne vaut-il pas mieux patienter
encore?
Mes amis, dit-il enfin, je n'ai rien à vous dire. C'est vous
qui allez me dire si vous voulez qu'on nous apporte à manger.
Question étrange ! À manger ? Pourquoi pas, si c'était
faisable ? Depuis l'avant-veille personne n'avait eu en bouche
ni une miette de pain, ni une goutte d'eau. Bien sûr que tout le
monde avait faim…
Vassiliev parla le premier :
«
Si c'est possible, qu'on nous apporte à manger, Ramazan
Iskendérovitch. Mais oui, naturellement ! Regarde comme tout
le monde est pâle ! Teïdar et Gricha ne sont pas en état de
soulever un tube à eux deux… Djamil prendra bientôt les
copeaux pour des morceaux de pain, et Taïr ne distingue plus
la mer des nuages. Les jeunes gens riaient. Seuls Ramazan et
Vassiliev gardaient un air soucieux.
Je ne plaisante pas, les gars, reprit Vassiliev. La tempête
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CHAPITRE IX