est aussi forte qu'il y a quatre jours. Peut-être même plus forte.
Il faudrait qu'on apporte à manger. Qui sait combien de temps
cela peut durer !
Et si on arrêtait les travaux ?
Ramazan ne leva pas la tête. Il avait reconnu la voix de
Teïdar. Mais il aurait consenti à demander des vivres plutôt que
de rester en arrière dans l’émulation. Il ne répondit pas. Les
autres gardaient le silence. Ramazan décida de prendre séparé-
ment l'avis de chacun.
Alors, Teïdar, faut-il ou ne faut-il pas qu'on nous apporte
à manger ? »
Teïdar n'était pas robuste. À présent, il avait les joues
creuses, les yeux tirés. Il baissa la tête et ne répondit rien. Et
Ramazan se disait que sa réponse était prête, mais qu'il avait
simplement honte de la dire tout haut.
«
Alors, c'est oui?
Un instant, permettez-moi d'y penser,
ousta
,
répondit
Teïdar en se détournant.
C'est bon, réfléchis… Et toi, Gricha ? »
Gricha, qui quatre jours auparavant était encore un jeune
homme aux joues roses, avait dû faire de nouveaux trous à sa
ceinture. Il commença, embarrassé :
«
Si on nous en apporte, eh bien… évidemment… ce ne sera
pas mal… Mais il se ressaisit et dit tout d'une traite :
ousta
,
vous avez arrêté les machines et mon estomac s'est mis à gar-
gouiller plus fort. Si on se remettait au travail ? »
Les autres riaient.
«
Je vous jure que je dis la vérité ! s'écria Gricha.
Ousta
,
nous
avons pris des engagements, le temps passe… Et pour les
vivres, eh bien, non, je ne suis pas d'accord. Quel que soit le
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MEKHTI HOUSSEIN
.
Apchéron