«
Tu as ta carte de contrôle ? » demanda Dadachly d'un ton
bref, comme si le regard que Taïr lançait à la jeune fille l’avait
blessé. Et, se tournant vers elle, il ajouta :
«
Latifa, tu le conduiras après au Comité d'arrondissement,
qu'il se fasse enregistrer.
Mais je n'ai pas pris ma carte de contrôle.
Il faudra écrire dès aujourd'hui qu'on te l'envoie ! »
«
Je sais aussi bien que toi ce que j'ai à faire, songeait Taïr
sans quitter la jeune fille des yeux. Est-ce que je la verrai
souvent ?»
Elle s'était mise à parler.
«
Les copains, demain soir le cinéma passe
Archin mal alan
.
Ceux qui veulent qu'on leur prenne des billets n'ont qu'à le dire,
je les inscris. »
Tout à coup ses yeux rencontrèrent les grands yeux de Taïr
qui la fixaient, et elle s'étonna au fond d'elle-même :« Qu'a-t-il
à me regarder ainsi ?»
Desvoix s'élevèrent ;
«
Inscris-moi !
Etmoiaussi ! »
Seul Taïr se taisait.
«
Et vous ?
Moi aussi. Je l’ai déjà vu, mais je le reverrai volontiers.
Alors, je vous inscris. Votre nom ?
Taïr. »
Djamil les écoutait, plein d'émoi. Et Samandar grognait en
lui-même : « Le dernier venu, le mieux reçu. » Il observait
Djamil du coin de l'œil : que pensait-il de la conduite de Taïr ?
«
Cet oiseau-là ne sait pas tenir en place », songea-il de nou-
veau.
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CHAPITRE I