C'est ainsi qu'
ousta
Ramazan avait l’habitude de mettre à
l'épreuve ses nouveaux apprentis : il voulait avant tout se
convaincre de leur courage. Ceux qui avaient victorieusement
subi l'épreuve étaient reçus avec honneur dans son équipe et il
leur pardonnait volontiers les fautes qu'ils commettaient par la
suite. Il avait pour devise: pourvu qu'on ne soit pas un lâche, le
reste viendra toutseul.
Le vieux maître foreur posa sa lourde main sur l'épaule de
Taïr. De l'autre, il lui montrale sommet du derrick enl'encour-
ageant :
«
N'aie pas peur, ce n'est pas difficile. Grimpe, on te dira ce
qu'il faut faire. »
Puis il cria à l'ouvrier d'en haut :
«
Guéïdar, monfils, descends, tu m'entends ? »
Mais il avaitdeviné le désarroide Taïr:
«
Tupréfèrespeut-être ne pas monter ? »
Taïr se fit violence etsourit :
«
Pourquoi ? Ce n'est pas si difficile ! »
Alors, va remplacer Guéïdar. Quel âge as-tu ? »
Fixant le maître foreur de ses yeux noirs, Taïr lui dit
fièrement:
J'aidix-septans,
ousta
.
Eh bien, pourquoi tu n’y vas pas ? Tu as peur ? »
Taïr leva la tête et fut ébloui. Il lui sembla que le derrick était
deux fois plus haut et l'escalier plus raide qu’avant. Mais il était
trop tard pour reculer. « On ne meurt qu'une fois», se dit-il.
Résolu, il se détacha des ouvriers qui le suivaient des yeux en
silence et se mit à gravir l'étroit escalier.
«
N'a-t-il jamais grimpé aux mûriers quand il était à la
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MEKHTI HOUSSEIN
.
Apchéron