voulu la remercier,mais au lieu de cela, il lui ditmaladroitement:
«
Ne t'occupe plus de moi. »
Elle lui tenditla main :
«
Au revoir ! »
Il prit sa main et la serra avec regret. Mais il se ressaisit
aussitôt.
«
Tu veux bien que je t'accompagne ?
Non, non, merci. J'aiencore à faire et je suis pressée. »
Elles'éloignad'un pas rapide.
La bibliothécaire inscrivit Taïr et lui remit son livre.
Il se précipita dans la rue et y plongea son regard. Latifa
avait disparu. Il marmonnait, mécontent de lui-même : Quel
empoté ! Pas deux sous dejugeote! Maintenant il n'avait plus
qu'à rentrer chez lui…Qu'elle est gentille ! se répétait-il tout le
long du chemin. Et il lui était impossible dene pas songer à elle.
4
Ils étaient six dans la chaloupe.Taïr s'était installé à l'avant,
à côté deDjamil.
La mer était lisse, pareille à un miroir. La chaloupe se
balançait doucement ; on se serait cru dans un grand berceau.
La brise fraîche et légèreeffleurait les visages. Le soir
descendait sur la Caspienne apaisée. Le soleil s'était couché,
mais ses derniers reflets embrasaient encore le ciel.
Le
Tchapaev
fendait la surface polie de la mer. Il transportait
l'équipe de nuit. Taïr tira de sa gaine le
saz
que sa mère lui avait
envoyé et se mit à l'accorder.
Ousta
Ramazan l'encourageait :
«
Joue, mon fils, joue et chante. La chanson nous aide à
oublier nos chagrins. »
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MEKHTI HOUSSEIN
.
Apchéron