«
C'est ton
saz
?
Oui, mamère me l'aenvoyé. Sanslui, je m'ennuierais. »
Étonnée, Latifa haussa les sourcils :
«
Tu sais en jouer ?C'est toi qui chantais dansla chaloupe ?
Oui.
Comme c'était beau !
Avec une audace qu'il ne se connaissait pas, Taïr releva la
tête, ému, et regardalajeune fille droit dans les yeux :
«
Ça m’avance bien ! »
S'il avait osé, il lui aurait dit : « Si mon jeu te plaît tant,
pourquoi ne m'aimes-tu pas ?»
Bien que jeune et sans expérience, Latifa avait deviné ce qui
se passait dans le cœur de Taïr et elle ne pouvait cacher sa joie,
la joie de toute jeune fille qui se sait aimée.
«
N'ai-jepas raison, Latifa ? »
Au même instant, il entendit la voix d'
ousta
Ramazan qui
l'appelait :
«
Où es-tu, Taïr? Nous t'attendons, mon fils !
Au revoir, il faut que je m'en aille » dit Taïr, qui voulait
lui montrer qu'il la quittaità regret.
Il rejoignit Djamil, et plus ému encore que fier, il lui souffla:
«
Tu as vu ?Je crois qu'elle m'aime. Pourquoi cet air étonné?
N’as-tu donc rien vu ?
J'ai vu Latifa, mais je n'ai pas vu qu'elle était tombée
amoureuse de toi. Non Taïr, non, tu auras beau faire, elle ne
t'aimera pas. »
Et satisfait de sa réponse, Djamil se mit à rire, avant
d’ajouter:
«
Elle sourit quand elle se trouve face à toi, mais dans ton
56
MEKHTI HOUSSEIN
.
Apchéron