Pourquoil'as-tu laissé partir ?
Il est fâché contre moi. Je ne lui ai rien dit de méchant,
mais il ne souffre pas la plaisanterie. »
Ousta
Ramazan prit son arrosoir et rejoignit Djamil hors du
jardin.
«
C'est peut-être contre moi qu'il est fâché ? Pourtant je ne
me rappelle pas de lui avoir rien dit de désagréable »
dit-il,posant sur Djamil un regard étonné.
«
Non,
ousta
,
je sais que c'est contre moi.
Il est parti à la gare ?
Je crois que oui.
Eh bien, il y a peut-être moyen de faire quelque chose. »
Le vieillard se dirigea vers le perron, en gravit les quelques
marches de pierre, traversa la galerie vitrée et parla au
téléphone.
Djamil n'avait pas bougé ; il attendait. Ramazan prit sa cas-
quette et sortit sur la route d'asphalte.
«
Vas-y,mon fils, va te reposer ! »
Djamil s'en alla, tout heureux d'avoir averti à temps lemaître
foreur. Une minute ne s'était pas écoulée qu'une auto bleue
roulant sur l'asphalte venait s'arrêter devant Ramazan.
«
Où voulez-vous aller,
ousta
?
demanda le chauffeur, un
grand homme noir, en se penchant dehors. Et pour qui ce
bouquet ? Puis-je me réjouir avec vous ? »
Alors seulement le vieillard s'aperçut qu'il tenait toujours les
fleurs en main, et souriant sans en avoir envie, il prit place dans
la voiture.
«
En route pour la gare. Là, tu verras ! »
Le chauffeur conduisait souvent le directeur chez
ousta
Ramazan. Il connaissait bien Nissa, la femme du vieux maître
79
CHAPITRE III