revenir, il n'y aurait pas au monde d'homme plus heureux que
moi. »
Le chauffeur ralentit légèrement, vira et roula vers la gare où
la foule s'agitait.
«
Ne soyez pas triste, vous verrez, ils reviendront tous les
deux. Mais pourquoi venez-vous ici ?
Tu vas voir, fit »
ousta
Ramazan.
Déjà il gravissait les marches, cherchant Taïr du regard. Ne
le trouvant pas, il se hâta de gagner le quai et longea le train qui
attendait sur la première voie. Penchés aux fenêtres des
wagons, les voyageurs faisaient leurs adieux à ceux qui étaient
venus les accompagner. Taïr n'était pas là.
Le chauffeur rejoignitRamazan.
«
Eh bien, vous ne l'avez pas vu ?
Non.
Mais qui est-ce ? Vous l'avez peut-être laissé passer ?
Non, il n'est pas encore… Le vieillard n'acheva pas, il
venait d'apercevoir Taïr qui arrivait, son instrument sous le bras
et sa besace à l'épaule. »
Quand il les croisa de son pas rapide, le maître cria :
«
Taïr ! »
Taïr se retourna et resta cloué sur place considérant le
vieillard avec intensité.
«
Qui êtes-vous venu chercher,
ousta
?
demanda-t-il enfin,
apercevant les fleurs que portait Ramazan.
Je ne viens chercher personne. Je viens t'accompagner.
Tu m'as abandonné, mais je ne suis pas comme toi, je ne renie
pas les miens.
Mais qui est-ce qui vous a dit que je partais ?
Le monde n'est pas sans bonnes gens. »
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CHAPITRE III