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le samovar », exposée au musée de Victoria et Albert à Londres présente, quant à elle, un intérêt absolument unique. Les différentes femmes représentées sont peintes
avec une telle inspiration que le visiteur reste sur l’impression qu’elles sont figées dans une cérémonie religieuse. Il n’y a rien d’habituel ou de banal dans cette
peinture qui pourrait sembler prosaïque. Le langage sublime du peintre et la majesté des personnages font de cette œuvre une exclusivité de la peinture de Gajar.
Il est important de spécifier que le style dit de Gajar occupe une place particulière dans l’art du XIX
e
siècle. Ceci est notamment dû aux différentes découvertes et
plus spécifiquement à celles de Chéki, qui offre la particularité d’être un art de cour complètement laïque.
Quand bien même certaines d’entre elles ont moins de valeur ou sont tout simplement des copies, leur nombre est beaucoup plus élevé que celui des périodes
précédentes et ne peut être comparé qu'à celui de la Renaissance en Europe. Parmi les œuvres des peintres azerbaïdjanais qui se trouvent au musée national des
Beaux-arts de Géorgie, on trouve les noms de Mohammed Hassan et de ses fils Beglar aga et Abulfaz. Les œuvres sont réalisées selon les traits du style de Gajar,
au caractère solennel, avec des habits et des accessoires raffinés, ainsi qu'une importance particulière accordée à l'individualisation des personnages. Les deux
portraits d'Allahverdu Afchar, prince héritier de Tabriz, effectués par Abbas Mirza, sont remarquables. Il s'agit d'un portait solennel, qui comporte cependant une
dimension psychologique reflétée par l'aisance naturelle du personnage.
Le style de Gajar s'est développé à la fin du XVIIIe à Téhéran. A l’instar du style de la cour de la dynastie turque de Gajar, il a atteint son apogée sous le Chah
Fathali Gajar. Le mélange des traditions occidentales et orientales lui donne son originalité. Ce phénomène artistique est notamment lié à la tradition d’apprentis-
sage des peintres orientaux en Europe.
Le style de Gajar n’était pas uniquement un art de cour. Ses principes se sont répandus par l’intermédiaire des arts appliqués. On le trouve dans les peintures sur
bois, dans les palais et les maisons des particuliers ainsi que sur la vaisselle métallique contemporaine.
En plus des peintres mentionnés par A. M. Grigolia, on connaît également les autres représentants de la famille des Afchar (Allahverdi, Abuhasan, Aliachraf) ainsi
que les peintres azerbaïdjanais de la période Gajar, tels que Abulhassan Tabrizi, Mehrali, ou encore Ismail Djelaïr. De par l’excellence de leurs œuvres, ces derniers
ont eu une grande influence dans le processus de formation de l’État azerbaïdjanais des Séfévides.
Cependant, les spécialistes s'accordent à dire que la véritable gloire de cette aire culturelle vient de la famille Afchar, dont les œuvres ont influencé la peinture
murale du XIX
e
siècle. Dans les faits, le rôle du style de Gajar dans l’histoire de l’art azerbaïdjanais a été primordial, car il a influencé la tradition des peintures
murales et l’œuvre de Mirza Gadim Irevani.
A partir du début du XIXe siècle, on observe des changements significatifs dans l'art azerbaïdjanais qui prend une toute autre direction. Cette évolution s'est pro-
duite notamment grâce aux activités d’intellectuels tels que Mirza Chafi Wazeh, Mirza Fatali Akhundov, Hasanbey Zerdabi, mais également grâce aux influences
des civilisations russe et occidentale. La démocratisation de la culture se manifeste à travers l'apparition de publications illustrées ainsi que dans l'oeuvre de peintres
comme Mirza Gadim Irévani, Mir Mohsun Navvab, Khurchudbanu Natavan, etc.
La renommée de M.K.Irevani (1825-75) a longtemps été due à ses peintures murales, ses broderies et à ses illustrations d'objets de la vie quotidienne.
Cependant, sous l’influence des nouvelles tendances de l’art, il s'est posé de nouveaux objectifs, aussi bien dans l'assemblage des couleurs que dans la composition
des lignes.